Trois étapes pour briser la malédiction
1. Ne pas se laisser posséder par son talent
Réduire ses propres attentes et celles des autres n’est pas la solution : on devient un suiveur. Mais les nier ne l’est pas non plus : on n’est plus perçu alors que comme un esprit rebelle. Tout est une question d’équilibre.
⇒ La vision Skillspotting : Pour parvenir à cet équilibre, il faut non seulement savoir demander de l’aide lorsque cela s’avère nécessaire, mais également être capable de lister ses propres besoins ainsi que ceux de ses interlocuteurs afin de créer des ponts entre les deux. C’est dans l’adéquation entre ses attentes personnelles et celles de son entreprise que se joue la vraie performance, qui permet de progresser et de se développer (voir notre article sur le paradoxe IKEA).
Comme le souligne Michael Sanson, coach à l’INSEAD, « un décalage clé s’opère lorsque le haut potentiel se rend compte que son rôle n’est pas de produire plus que les autres, mais de produire plus avec les autres ».
⇒ L’idée n’est pas d’être indépendant donc seul, mais de parvenir à l’interdépendance, c’est-à-dire d’avoir la capacité à créer les bonnes synergies.
Adéquation
2. Se montrer sous son vrai jour, pas seulement sous son meilleur jour
Il est tentant de ne montrer que les aspects polis et brillants de sa personnalité, surtout quand on les valorise soi-même et que les autres les apprécient. « On retrouve ainsi cette dimension des personnalités « as if » pour lesquelles il est essentiel de conserver l’illusion que tout va bien [qui] ne sert qu’à dissimuler, aux yeux des autres, mais surtout à leurs propres yeux, une dépression blanche, sans autres symptômes que cette affirmation du « tout va bien, que pourrais-je demander de plus ? », met en garde Maryse Dubouloy. Pourtant, beaucoup tirent leur capacité à gérer les flux de leur propre agitation, leur créativité de leur angoisse et leur résistance des différents défis auxquels ils ont eu à faire face, et les managers qui savent faire preuve d’empathie sont parfois submergés par leurs émotions. Au lieu d’essayer de lutter contre les sources obscures de son talent, mieux vaut apprendre à les canaliser.
⇒ S’accomplir dans son travail suppose d’honorer pleinement ce que l’on est en le mettant au service d’un projet qui nous dépasse ou d’un collectif qui cherche à atteindre un but qui résonne en nous.
3. Valoriser le présent
Il s’agit là de l’étape la plus importante pour briser la malédiction. Posez-vous la question : Et si mon poste actuel n’était pas un tremplin mais un achèvement en soi ? Investissez-vous dans le travail que vous faites maintenant, faites-le compter, pour vous enrichir de cette expérience.
⇒ Et souvenez-vous : la carrière n’est pas un cent mètres, c’est un marathon (voir aussi notre article sur la gestion du temps et de l’énergie). Il est donc important que vous adaptiez votre foulée aux conditions du moment pour gravir les marches une à une. Bien sûr, vous aurez besoin de temps à autre d’anticiper pour prendre de la hauteur, mais n’oubliez pas de revenir régulièrement « ici et maintenant ». Apprenez à ne pas être tout le temps en accord avec votre entourage, à accepter la critique constructive et à en faire l’occasion de challenger votre vision des choses pour faire émerger des solutions plus puissantes, plus adaptées (voir notre article sur l’importance du feedback).
Un rite de passage
Briser cette malédiction fait partie intégrante de l’apprentissage du leadership. C’est un processus continu, qui permet d’endosser de nouveaux rôles. Revenons à Laura : lors d’un séminaire d’équipe, elle finit par avouer qu’elle songeait à partir. Elle exposa des arguments qu’elle avait longuement ressassés et expliqua comment l’organisation de son département créait des frictions entre elle et deux de ses pairs. À sa grande surprise, ce qu’elle imaginait déjà être un discours d’adieu fut très bien reçu et la verbalisation de ses préoccupations s’avéra payante : la structure changea, et elle resta.
⇒ De la même manière, il est vital d’encourager les leaders à rechercher de l’aide au sein de leur équipe et des équipes partenaires afin de créer des écosystèmes facilitant les synergies au sein de l’organisation. Pour ce faire, il faut accepter de percevoir l’aide pour ce qu’elle est : un accélérateur de performance, et non l’aveu d’une faiblesse honteuse qu’il conviendrait de cacher (une fois encore, nous pouvons nous référer ici au modèle du triangle).
« La plupart des dispositifs mis en œuvre par les entreprises pour gérer leurs HP ont souvent comme effet paradoxal de renforcer leur conformisme alors qu’il faudrait, au contraire, développer leurs capacités créatrices et innovatrices », souligne Maryse Dubouloy. Voilà qui nous conduit au dernier point de cette démonstration : les entreprises doivent elles aussi aider à briser la malédiction en autorisant leurs dirigeants à dévier de l’image-type de direction qui a été façonnée par d’autres ; les managers se sentiront alors moins sous pression et plus libres d’utiliser simplement leur talent et de s’engager pleinement dans leur travail. « Trouver un espace transitionnel est une opportunité pour évoluer à nouveau, gagner en maturité. Cela peut parfois aussi être l’occasion de changements radicaux, d’une nouvelle progression, l’opportunité de se débarrasser d’un faux-self pour une construction identitaire nouvelle. La formation, le coaching (…) peuvent jouer ce rôle d’espace transitionnel », selon Maryse Dubouloy.
→ C’est dans cet esprit que Skillspotting vous propose des parcours managers en blended learning, formation et coaching. Si vous êtes intéressés, contactez-nous : nous nous réjouissons d’aider vos dirigeants à briser la malédiction et à faire émerger leur style de leadership situationnel !
Note
¹INSEAD : Institut européen d’administration des affaires, école privée de management ayant trois campus principaux à Fontainebleau, Singapour et Abu Dhabi, et membre de Sorbonne Universités. Son MBA a été classé n°1 mondial en 2016 par le Financial Times.
Sources :
– Jennifer Petriglieri / Gianpiero Petriglieri, The Talent Curse, Harvard Business Review, May-June 2017
– Savannah Horton, The Talent Curse : when your « future leader » label gets in the way of good work, Bowdoin Dayly Sun, April 20, 2017 : http://dailysun.bowdoin.edu/2017/04/the-talent-curse-when-your-future-leader-label-gets-in-the-way-of-good-work-harvard-business-review/
– Maryse Dubouloy, Les « hauts potentiels » et le « faux-self », in Le Journal des psychologues 2006/3 (n°236), p.22-26 : http://www.cairn.info/revue-le-journal-des-psychologues-2006-3-page-22.htm